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Mme Constance Le GripDate : mercredi 26 mai 2021Cible : Sur l'ensemble du texte
J'ai voté en première lecture contre le projet de loi visant à restaurer la confiance de nos compatriotes dans la justice. En effet, si ce projet de loi comporte quelques avancées utiles, il ne m'apparaît pas de nature à atténuer la défiance de nombre des Français en l'appareil judiciaire ni à sensiblement améliorer le travail de la justice. J'approuve par exemple le renforcement du secret professionnel des avocats et me félicite que des amendements en ce sens, dont ceux que j'avais déposés, aient été adoptés en commission des Lois. De même, la suppression du rappel à la loi, due à l'adoption d'un amendement de mon collègue député Les Républicains Eric Pauget, me semble être une bonne chose, tant ce rappel à la loi était devenu synonyme de l'impuissance de la justice. La limitation dans le temps de la durée d'une enquête préliminaire et l'introduction du contradictoire dans cette enquête vont dans le sens attendu. Mais, au-delà de ces quelques mesures techniques de bon sens et que tout Gouvernement aurait mises en œuvre, ce projet de loi me semble doté d'une assez faible envergure et manque de volontarisme et d'ambition. Malgré l'objectif affiché dans son titre, la confiance ne m'apparaît pas au rendez-vous ! Si la défiance et le ressentiment de nos compatriotes envers la justice sont malheureusement une réalité, c'est aussi et surtout parce que, du manque de moyens à des dysfonctionnements de plus en plus insupportables, de la politisation d'une partie des magistrats à la lenteur incompréhensible des procédures, du trop faible nombre de décisions de justice vraiment exécutées à l'absence de véritables sanctions pour les auteurs de toute une série de délits qui empoisonnent la vie de nos concitoyens, les maux de la justice sont profondément ancrés, et ce projet de loi du Garde des Sceaux n'y apporte pas de vraies réponses. Ce texte est aussi frappé de certaines lacunes qui me semblent fort dommageables : pas de renforcement des droits des victimes, pas de création de peines-planchers pour les auteurs d'agressions commises à l'encontre de nos forces de l'ordre et nos sapeur-pompiers, rien sur la simplification des procédures pénales alors même que, dorénavant, la présence de l'avocat lors des perquisitions va alourdir le travail des enquêteurs. Pour ces raisons, et parce que je n'approuve pas la politique pénale mise en œuvre par l'actuel Garde des Sceaux, qui ne m'apparait pas assez protectrice des victimes et de nos forces de l'ordre, et ce dans un moment où des dissensions entre police et justice se font entendre, j'ai choisi en conscience de voter contre ce projet de loi.
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Mme Marine BrenierDate : vendredi 21 mai 2021Cible : Sur l'Article 1er
Pourtant au cœur de la confiance que le peuple accorde en la Justice, la grande absente de ce texte est la présomption d’innocence. Montesquieu démontrait déjà à l’époque l’importance de ce sujet : « Quand l’innocence des citoyens n’est pas assurée, la liberté ne l’est pas non plus ! ». A l’heure où les citoyens doutent, voire craignent leur système judiciaire, ce texte passe à côté. Nous ne devons pas tomber dans un débat entre la présomption d’innocence et la liberté d’expression. Toutes les libertés ne se trouvent pas sur le même plan. La présomption d’innocence doit être garantie et doit être le principe, la liberté d’expression, son exception.
Pourtant, la présomption d’innocence s’efface de plus en plus pour les personnes mises en cause, notamment dans les médias et les réseaux sociaux. C’est une nouvelle ère que nous vivons, celle des procès médiatiques. Si le sujet n’est pas de trouver des coupables à ce changement, la réalité démontre tout de même que la parole accusatrice est prédominante dans les médias et plus particulièrement dans les chaînes d’information en continu, au contraire de notre système. L’hypothétique se transforme alors en vérité pour le public et l’instruction médiatique devient alors à charge et n’a que faire que la culpabilité ait été établie. Cette justice spectacle, qui nous permet de suivre les affaires en temps réel, est là pour répondre à un besoin de « sang » de la part de l’audimat. Cette place publique, sur laquelle est jugée le présumé innocent, est gorgée d’insultes, menaces, opinions personnelles et publiques, donnant ainsi plus de force à l’accusation et pouvant induire une culpabilité hors des murs du tribunal.
Chacun se fait juge. La peine infligée à l’auteur présumé d’un délit ou d’un crime, dépend alors de la seule gravité ressentie par l’opinion publique. C’est ainsi que nous passons dans un jugement moral plutôt que juridique. Si nous voulons redonner toute confiance en l’institution judiciaire, nous devons donc nous demander quelle est la place de notions aussi fondamentales que la présomption d’innocence, au sein de notre société et notre système judiciaire.
La République repose sur trois pouvoirs : exécutif, législatif et judiciaire. La confiance de nos concitoyens doit exiger avant même de filer les audiences, le renforcement de la présomption d’innocence dans notre société.